Les chroniques de Nolwenn
La preuve électronique dans le divorce

24 septembre 2014

Votre page Facebook peut-elle vous nuire ?…

Les nouveaux modes de communications, les smartphones, les réseaux sociaux, les messageries instantanées, sont devenus en quelques années un terrain d’investigation pour dénicher des preuves de la trahison de l’autre en vue d’un divorce pour faute. Toutes les preuves ne sont pas recevables pour autant. Et avant de se lancer dans ce type d’enquête, peut-être faut-il se demander si le jeu en vaut vraiment la chandelle ?…

Évidemment, c’est terriblement tentant de subtiliser le téléphone portable de son époux/se pour y dénicher des emails compromettants ou des sms coquins. La preuve – par sms, par email, via internet, etc. – n’est recevable qu’à la condition qu’elle n’ait pas été « obtenue par violence ou fraude » (art. 259-1 du Code civil) et qu’elle ne porte pas atteinte à la vie privée (en pratique celle de l’amant ou de la maîtresse). Donc exit les enregistrements de conversation à l’insu de la personne en utilisant un enregistreur ou un logiciel espion.

A lire aussi : Infidélité virtuelle : faute réelle ?

Pour verser aux débats des échanges de sms, il est préférable qu’ils fassent l’objet d’un procès-verbal de constat établi par un huissier de justice plutôt qu’ils soient recopiés, photographiés, ou récupérés via un logiciel quelconque etc… Autant dire qu’il s’agit d’une démarche plus contraignante qu’il n’y parait (sans parler du coût de la procédure qui s’élève en général à un peu plus de 300 €). L’écrit sous forme électronique est une preuve recevable, au même titre que les écrits sur support papier, « sous réserve que puisse être dûment identifiée la personne dont il émane et qu’il soit établi et conservé dans des conditions de nature à en garantir l’intégrité » (art. 1316-1 du Code civil). On est loin de l’esprit « détective privé », « filature » ou « mise sur écoute » que certains imaginent lorsqu’ils se lancent dans ce type de recherche.

Le web a des oreilles

Sur internet, les moyens de s’exprimer, de communiquer, d’échanger, sont légions : des réseaux sociaux aux messageries instantanées, en passant par le compte de messagerie classique. Mais là encore, on ne peut subtiliser les codes d’accès… S’il arrive régulièrement d’entendre « je suis tombé(e) par hasard sur ce mail », nul ne saurait être dupe. Les règles sont les mêmes pour ce que l’on peut trouver directement en ligne. Les messageries instantanées (What’s app, BBM, Messenger de Facebook, etc.) sont plus récents dans l’univers du web. Mais le mode de diffusion de ces réseaux ne permet pas de certifier l’identité de l’expéditeur. Il arrive pourtant d’y trouver des échanges plus que compromettants !…

A lire aussi : Divorce : comment votre page Facebook peut se retourner contre vous

Même si ces pièces ne peuvent pas toujours être utilisées devant le juge, elles peuvent peser en phase de négociation car elles permettent souvent de mettre à jour des faits, des ressentiments, des douleurs qui sont extrêmement importants et dont on doit tenir compte si l’on veut parvenir à un accord. Cela peut aussi être un moyen d’éviter le contentieux en ramenant la partie adverse à la raison.

Car en définitive, il est presque toujours conseillé d’éviter le contentieux. Le divorce pour faute ne permettra pas d’obtenir une compensation financière plus importante ni des droits plus étendus sur les enfants. Alors avant tout, il convient de se demander pourquoi fouiller dans les emails de l’autre et engager des frais importants en constats d’huissier et honoraires d’avocat. Faire reconnaître que l’échec du mariage est la faute de l’autre est une attitude bien naturelle, compréhensible et humaine, mais la reconnaissance de la faute au sens juridique du terme n’apporte que très rarement la réponse ou la compensation psychologique recherchée.

Partager l'article

Le droit de la famille autrement

Vous voulez nous exposer votre situation ?